
L’introduction de nouveaux droits de douane américains le 2 avril marque un changement fondamental dans la politique commerciale des États-Unis, affirme Alex Tedder, CIO Equities chez Schroders. Les droits de douane effectifs sur les importations en provenance des États-Unis atteignent plus de 25 %, soit leur niveau le plus élevé depuis 120 ans. La réaction immédiate du marché a été vive : le S&P 500 a connu l’une des plus fortes baisses à court terme depuis des décennies, alimenté par les craintes d’une récession mondiale.
Il est intéressant de noter que les droits de douane ne concernent pas seulement la Chine, mais s’étendent également aux pays d’Asie du Sud-Est qui servaient auparavant de sites de production alternatifs après la première administration du président Trump. Il est donc plus difficile pour les multinationales de contourner les barrières commerciales érigées. La portée plus large et l’intensité plus forte de ces nouveaux droits de douane ont dépassé les attentes et exercé une pression sur les chaînes d’approvisionnement mondiales.
Opportunités d’investissement stratégique sur des marchés volatils
Si la prudence est de mise dans une situation encore et toujours changeante, la volatilité accrue peut aussi offrir des opportunités aux investisseurs. Comme lors de la crise du covid, les perturbations du marché peuvent créer des opportunités d’investissement dans des segments structurellement attractifs.
Les entreprises de qualité qui misent sur la planification à long terme, la diversification de leurs chaînes d’approvisionnement et le maintien de solides relations avec leurs clients sont particulièrement bien placées pour s’adapter à cette nouvelle dynamique commerciale. Bien qu’elles puissent initialement faire l’objet de pressions à la vente, elles peuvent offrir des rendements corrigés du risque supérieurs à moyen terme.
Les entreprises disposant d’un pouvoir de fixation des prix, d’une forte exposition au marché intérieur et de carnets de commandes bien remplis sont intéressantes pour les secteurs d’activité qui se trouvent en plein dans la ligne de mire du conflit commercial. Les secteurs moins touchés par les tensions commerciales, tels que les banques, les soins de santé et les services publics, peuvent offrir une sécurité relative. Les valeurs de croissance défensives peuvent faire leurs preuves grâce à la stabilité de leurs bénéfices.
Perturbation du régime commercial existant
La rhétorique de la Maison-Blanche suggère que les droits de douane ne sont pas de simples outils de négociation, mais servent également d’outil de politique structurelle pour protéger l’industrie nationale et générer des revenus pour les autorités. Bien qu’il reste une marge de négociation sur les droits de douane réciproques, la plupart des taxes devraient rester en place. La réaction internationale est vive : des termes tels que « contre-mesures » et « représailles » sont souvent utilisés. L’escalade du conflit avec la Chine confirme cette image. L’incertitude quant à l’évolution de cette politique commerciale, combinée à d’éventuelles réactions des banques centrales telles que des baisses de taux d’intérêt, laisse présager une volatilité persistante des marchés à court terme.
Implications pour la position dominante des États-Unis et opportunités en dehors des États-Unis
Les États-Unis semblent prêts à accepter des difficultés économiques significatives à court terme en échange d’une révision de la balance commerciale mondiale. Cela se traduit directement par une augmentation des coûts, une pression à la hausse sur l’inflation, un tassement de l’activité économique, une pression sur les marges bénéficiaires et une perte de confiance des consommateurs et des entreprises. Voilà une évolution risquée pour une économie qui dépend fortement d’un consommateur puissant. Les ménages à faibles revenus, en particulier, voient déjà leur pouvoir d’achat diminuer.
En dehors des États-Unis, l’accroissement des taux d’épargne et l’assouplissement des politiques fiscales et monétaires semblent susceptibles d’apporter un certain soutien. Europe, en particulier, pourrait en tirer profit. L’affaiblissement du dollar, qui se situe actuellement à son plus bas niveau depuis six mois, reflète la perte de confiance dans les perspectives de croissance des États-Unis. Cela confirme l’attrait des actions non américaines.
Pour les marchés américains, des mesures fiscalement favorables telles que la réforme fiscale et la déréglementation pourraient apporter un soulagement. Néanmoins, cela semble insuffisant pour compenser totalement l’impact négatif des droits de douane actuels.
Le marché n’aime pas l’incertitude. Avec les entreprises qui reportent leurs décisions d’investissement et les consommateurs qui gardent la main sur les cordons de la bourse, les premières révisions à la baisse des estimations de croissance se manifestent déjà. L’impact économique de la politique commerciale de Trump se fait donc déjà sentir - à l’intérieur comme à l’extérieur des frontières américaines.
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